La première chose que vous retenez, en rencontrant Erlann Kunviel, c’est son physique râblé, il se trouve être plus petit que la moyenne des femmes silkiennes et sa forte carrure évoque plus un fermier habitué aux travaux des champs qu’un intellectuel. Sa panse est celle d’un grand consommateur de thé d’origine nuwa bien que les conditions frugales de ses fréquents voyages l’ait fortement amaigri. Cependant, son visage ovale ne présente pas les traits d’un silkiens typique, Erlann s’est fait un tatouage vigescien à Armasdem ce qui démontre une ouverture d’esprit à d’autres cultures que la sienne. De plus, l’autre côté de son visage est couturé de cicatrices noircie, sans doute la conséquence d’un empoisonnement floral des plaies, mais dont la finesse témoigne de la qualité des soins apportés.
L’apparence franche et ouverte son visage, marqué par une importante pilosité faciale de couleur châtain et quelques plis sur le front, détonne avec ses yeux marrons perdus qui recèlent une étincelle de malice et peut-être de cynisme. Ce n’est pourtant pas un homme violent ou dangereux, son esprit représentant le véritable danger. Quand il retourne temporairement à Salbourg pour voir sa famille et les enfants de sa femme, il prend le temps de revêtir des habits plus conforme à la vie sociale de la petite bourgeoisie et de rafraîchir ses cheveux ainsi que de tailler sa barbe pour être présentable. En effet, la vie sur les routes ne se prête guère aux soins capillaires donc il fait sa toilette de manière mensuelle, parfois trimestrielle. Sinon, il porte souvent des vêtements verts et marrons appropriés aux conditions de voyage une cape grisâtre délavée par les intempéries et la boue ainsi que des bottes conçues pour un tel usage.

Enfance

Durant son enfance, il était associé aux travaux manuels qu’il était en âge de faire et montrait une curiosité naturelle pour ce qui l’entourait en particulier ses grands frères Martryn et Farrell. Il adorait les écouter ainsi que les autres adultes afin d’apprendre tout ce qu’il pouvait toutefois sa curiosité lui valait des ennuis quand il s’appliquait à faire des choses dangereuses ou parfaitement stupides. L’histoire familiale le poussait à avoir des rêves d’aventures et peut-être envisageait-t-il de s’engager dans une opération de défrichement comme son père l’avait fait. Tout est-il que le massacre du Chancreux surnommé « La Dame de la Forêt » doucha quelque peu son enthousiasme. Erlann découvrit que même les héros pouvaient mourir et déchoir, la mort de Martryn et la souffrance de Farrell le toucha profondément. Au point que s’il le fallait, il aurait le courage moral d’éliminer un infecté de sang-froid.
Les contes du prêtre chargé de la célébration des dieux et les leçons de son précepteur qu’il affinera plus tard avec ses professeurs du pensionnat affutèrent son imagination et son intelligence. Il affichait une certaine morgue avec ses frères car il savait lire mieux qu’eux avant que son père ne le remette à sa place en lui expliquant qu'il ne fallait mépriser les autres pour ce qu'ils ne savent pas mais les respecter pour ce qu'ils savent mieux que soi. Ainsi, Erlann considère que l’important n’est pas de réussir mais d’essayer, rien n’est fondamentalement impossible selon lui.

Adulte

Il conserve toujours sa curiosité d'enfant. En dépit de sa capacité à bien se tenir en société et de ses talents en négociation, ce n’est pas un homme qui supporte très bien l’attention d’un public, il lui faut s’imaginer parler à une personne en particulier pour parvenir à s’exprimer. Erlann vit mal l’incompréhension et le désir d’ascension sociale de la famille, ses choix personnels ne sont pas compris par son père et sa femme avec qui il entretient une relation orageuse. Cela fait partie des raisons qui le pousse à voyager, peut-être est-ce une forme de lâcheté, même s’il aime ses enfants. Enfin, plus exactement les enfants de l’amant de sa femme car cela fait plusieurs années qu’ils ne partagent pas leur couche. Erlann montre une affection particulière pour sa fille Mérovée contrairement aux deux garçons.

J’ignore qui vous êtes, je ne sais que deux choses ; vous avez trouvé mon carnet et vous êtes en train de lire ces lignes. Elles sont peut-être les dernières que j’aurais écrite avant l’ultime traversée des Portes d’Origin. Que j’arpente ou non le monde des Dieux, je vous prierais d’apporter ce carnet à ma chère amie Lyudmilla A. Grindelwald, alchimiste de son état. Elle saura faire respecter mes dernières volontés et le transmettre à qui de droit.

Je devine que vous n’avez pas su réfréner votre curiosité ; vous venez d’en tourner la première page. Vous vous demandez qui peut bien être l’auteur de ce recueil et ce qu’il a écrit entre ces pages, je m’emploierais donc à vous satisfaire mon mystérieux lecteur, lectrices.



Mon père, Milo Kunviel, faisait partie de ces jeunes volontaires qui s’engagèrent dans une expédition de la firme Atrium. Il n’avait pas d’autres ambitions que d’obtenir les terres promises par la firme à l’issue de cinq ans et de fonder une famille grâce aux revenus qu’il en tirerait. Il aidait au défrichement qui s’avérait une tâche particulièrement ardue ; des plantes invasives reprenaient les terres perdues, des blessures, des maladies et des empoisonnements survenaient inlassablement. Il arrivait que la famine ou la disette menace En ces temps difficiles, les jeunes enfants étaient mis à contribution souvent dès leur sixième année et n’allaient pas à l’école. C’est le sort qui échut à mes ainés Martryn et Farrell qui furent les seuls à dépasser leur douzième année. Tous deux étaient nés de la première femme de mon père, Callis. Ils donnèrent toutes la force de leurs bras pour permettre à notre famille de subsister quand mon père devint trop usé par les blessures, un empoisonnement et le travail. C’était la frontière sauvage, la limite entre une nature hostile et une terre maîtrisée par les soins de l’homme.



Je suis né en 1984, ma mère était la deuxième femme de mon père. Elle s’appelait Deria. Salbourg était alors devenu un havre relativement sûr grâce au labeur des pionniers et de leurs descendants. Ma génération reçut la chance de pouvoir à l’école ; encore que les différents âges se mélangeaient dans la salle de classe rudimentaire du précepteur. Je me consacrais avec autant d’enthousiasme à apprendre les leçons peut-être même plus que les tâches manuelles à la maison. J’appris à lire parfaitement alors que mes frères qui savaient à peine épeler leur nom à voix haute. Je me moquais d’eux ce qui me valut une sévère réprimande de mon père. Il me fit entrer dans le crâne que le force et l’esprit avaient la même valeur, que nous étions tous intelligents dans la mesure de nos connaissances. Je ne pouvais prétendre avoir la science de la forêt et des plantes que possédaient mes frères mais eux ne sauraient prétendre connaitre tout ce que j’assimilais. Pourtant, mes frères m’impressionnaient par leur maturité et leur courage ; ils avaient affronté des dangers à une époque que je n’avais pas connue. Je voulais entendre leurs histoires car à mes yeux, le simple fait d’aller arracher des mauvaises herbes était de l’héroïsme connaissant l’hostilité de la flore silkienne. J’écoutais les histoires de notre prêtre qui se trouvait être le meilleur conteur du village. Il nous racontait des histoires des dieux et des hommes et j’aimais en particulier l’histoire de l’homme aux bottes de cristaux qui voulut marcher sur la brume.



Un jour, un villageois repéra une plante ambulante à l’apparence monstrueuse comme si elle avait fusionné avec autre chose. Vous devinez aisément ce que c’était : un chancre végétal. La menace ne pouvait être ignorée, tous les hommes prirent leurs haches, leurs fourches, leurs marteaux et partirent la détruire en sachant que le souffle de Vermine pesait sur leurs épaules. Ils savaient qu’ils ne reviendraient peut-être pas mais ils devaient le faire. Mon père fut forcé de rester et de regarder partir ses fils la peur au ventre. Il aurait voulu en être mais son corps en avait cependant décidé autrement. Ce jour était aussi frais que possible dans ma mémoire, je me souvenais de la bénédiction du prêtre des dieux mot pour mot et du retour de ces hommes. Il y avait cette procession d’hommes appuyés sur leur camarade valide, des regards vides et décomposés et des corps sans vie parfois mutilés. Vous imaginez bien que j’avais cherché à connaitre le sort de mes frères avec mon père, je trouvais Farrell, le visage harassé, les yeux éteints. Ses lèvres tremblaient et semblaient incapables de proférer le moindre son, il ne sut pas mettre de mot sur l’affrontement ni nous dire que Martryn n’avait pas survécu. C’était irréel de voir son cadavre, je croyais qu’il dormait simplement refusant de croire que mon frère, encore en vie quelques heures plus tôt, avait franchi les portes d’Origin. Il demeurait désormais auprès des dieux.


Après ce carnage, Salbourg changea profondément, nous regardions les survivants essayer de se remettre de l’expérience. Le Chancre tué devint une partie du folklore local, on le nomma "La Dame de la Forêt". Certains le faisait dans la boisson, d’autres dans une foi plus ardente ou se suicidaient. Pour mon père, perdre un des fils issu de sa première femme avait été terrible, son tempérament était plus bilieux qu’auparavant. Il nous effrayait parfois moi, ma petite soeur de 6 ans, Callis et sa troisième épouse. Seul Farrell semblait épargné par ses colères sauf quand le sujet de Martryn arrivait sur le tapis. Je comprenais que père souffrait de la perte de son premier né plus durement que celles de ses autres enfants ou de ses épouses. Martryn était son préféré. Je remarquais que mon père passait plus de temps à discuter avec mon précepteur et à m’encourager, j’ignorais encore que ce dernier estimait que mes résultats valaient une bourse. Il m’avait donc recommandé pour une bourse de la firme Atrium. Je ne l’appris que le jour où je dus signer ce contrat, la Firme s’occuperait de me vêtir, de m’éduquer et de me nourrir et en échange, je leur devais des résultats exemplaires et des années de ma vie à leur service.



En soit, j’étais heureux d’être reconnu comme un brillant élève mais, ne vous y trompez pas, je restais un enfant triste de quitter son village natal et sa famille. Les représentants de la firme Atrium avaient décidé de me placer dans un pensionnat de Sorréal. Je découvris un monde plus vaste que Salbourg, je vis Sorréal dont je n’avais entendu que des échos par les rares voyageurs qui osaient approcher la frontière sauvage. Imaginez donc ce que ressentait l’enfant d’alors devant cette vision d’une cité de pierre et des badauds qui foulent son sol pavés. Je n’avais jamais imaginé partir de mon village en dépit des rêves que j’avais et voilà que cela m’arrivait. Mes yeux ne pouvaient que boire ce spectacle. C’est ici que j’acquis un savoir complet et varié bien que je ne surmontais que difficilement les exercices oratoires en public ; il me fallait m’imaginer parler à une seule personne si je voulais bien m’en tirer. Je fis connaissance avec les autres élèves de diverses origines, mais ils étaient tous là pour apprendre. Devenir des ingénieurs, des inventeurs, des administrateurs et mille autres métiers. Tout cela m’intimidait facilement, ce n’était plus la classe unique où tout le monde connaissait tout le monde, j’avais des inconnus en face de moi. Je m’enfermais dans une solitude distante avec des livres et je fis bien car les professeurs se montrèrent sévères, n’hésitaient pas à recourir aux aux privations, aux humiliations et renvoyaient ceux qui ne montraient pas de résultat dans la boue et la honte. Il y avait une telle pression sur les élèves boursiers ; on attendait d'eux qu'ils excellent ou dans le cas contraire, privés de bourse et renvoyés chez eux.


Quand je rentrais à Salbourg, je découvris une petite ville épanouie et des champs à perte de vue, le pari de mon père était gagné mais je savais grâce à l’enseignement reçu combien cela aurait pu mal tourner une telle expédition même avec le soutien d’Atrium. Je retrouvais enfin une famille dont je n’avais reçu aucune lettre. Trop cher sans doute pour eux de les faire transmettre par phénix. Ma mère était morte pendant ces années où j’étais au loin et mon père s’était remarié… Sa troisième épouse lui avait donné de nombreux enfants. Je ne reconnaissais plus cette maison que j’avais quitté enfant, mon père avait perdu de son éclat pour être ce vieil homme diminué et amer et Farrell ne ressemblait plus au héros de mon enfance ; il buvait comme un tonneau sans fond. Je me suis efforcé de m’intégrer, je me suis même marié ! Mais je repensais sans cesse à Sorréal. Je ne me voyais pas finir ma vie dans ma ville natale en tant qu’administrateur de la firme Atrium même si je la chérissais de tout mon coeur.



Je demanda quelques années plus tard une mission à l’étranger que l’on m’accorda en m’envoyant en Nuwa dans une ville portuaire. J’assurais l’expédition des graines nuwas et réceptionnais la marchandise agricole que l’on s’efforçait d’écouler sur le marché. C’était compliqué avec la méfiance naturelle des Kaiming de Reng envers les étrangers et l’insulte que nous faisions à leur déesse en la comparant à Vermine. Je fus témoin d’incident au fil des ans qui montrait que, malgré la paix, cette hostilité restait très profonde. Ce que je trouvais regrettable puisque j’apprécie leur thé ! Mon épouse resta à Salbourg plutôt que de m’accompagner, elle était d’ailleurs furieuse que je fasse un tel choix tout comme l'était mon père. Je n’arrivais pas à correspondre à leurs attentes de fils prodigue et de mari attentionné, Syphax n’avait pas béni notre union en y apportant l’amour. Nous ne nous aimions pas, nous faisions même chambre à part quand j’étais présent.


J’acquis une maitrise de la langue et une connaissance de la culture nuwa qui m’évitait de commettre des impairs dans mes négociations - raison pour laquelle on commençait à évoquer mon nom en tant qu’ambassadeur. Malheureusement, il se produisit un incident entre silkiens et nuwa dans une maison de Mahjong qui déclencha une véritable chasse à l’homme. Je ne vous saurais décrire l’effroi que cela faisait d’apprendre que des silkiens s’étaient faits publiquement lapider par les Kaiming de Reng. La nouvelle me fit comprendre qu’un massacre généralisé pouvait survenir si personne n’étouffait ces braises ; je fis le choix de livrer des coupables à la justice nuwa afin de calmer la population. Ce sacrifice m’ébranla au point que je renonce à la charge d’ambassadeur qu’on me destinait et à ma charge d’administrateur quitte à payer une amende à la Firme Atrium. C’est une chose de tuer des personnes malades du Chancre, c’en est une autre de calmer une soif de sang populaire avec des vies. À Salbourg, mon père et mon épouse me reprochèrent d’avoir sacrifié la chance d’une élévation à la noblesse. Ils ne pouvaient pas comprendre qu’on puisse avoir des états d’âme. Et puis, je n’avais pas besoin de la noblesse pour gagner de l’argent.


Je ne cherchais pas l’absolution en décidant d’un voyage à Armasdem, non, je voulais découvrir le peuple du désert et ses coutumes autrement que par les récits d’explorateurs. Je savais l’aventure dangereuse aussi avais-je soigneusement préparé mon affaire en achetant un cristal de couleur turquoise. En revanche, je ne m’attendais pas à que la marche fut aussi pénible pour mes pieds ni que le sol fut aussi désagréable quand il pleuvait ! C’aurait été bien plus pénible si mon frère Farrell ne m’avait pas fait la surprise de m’accompagner ; je lui ai demandé s’il ne craignait les Chancreux qui pullulaient en Vigescie, il me répondit avec philosophie « vis au jour le jour ». Pour une surprise, c’en était une sacrément grosse, je me souvenais de son regard après avoir tué le Chancre végétal qui menaçait notre village. Je ne pensais pas qu’il aurait le courage de me suivre en Vigescie. C’était une bonne chose d’ailleurs sinon je ne crois pas que je serais revenu vivant du voyage. C’est Farrell qui me sauva la vie quand il fallu m’amener à une guérisseuse de talent pour traiter une blessure que je m’étais faite. Lyudmilla A. Grindelwald.


Après ma guérison, nous reprîmes le chemin de la Vigescie, nous ne nous arrêtions seulement pour nous réapprovisionner et nous nourrir. Mais une fois arrivé à la frontière, nous décidâmes d’attendre une caravane plutôt que de nous lancer dans le désert - un milieu que nous ne connaissions pas. C’aurait été suicidaire autrement. Dès que nous obtînmes une place dans une caravane, je me mis en devoir d’interroger le guide vigescien sur sa patrie et ses dangers en revanche Farrell était plus distant comme absorbé par la crainte d’une attaque de Chancre. T’Evilan, le vigescien, nous épargna à plusieurs reprises une rencontre nez à nez avec les créatures cauchemardesques qui infectaient la Vigescie, son talent avait cependant des limites puisque nous dûmes en combattre une en pleine nuit. Elle ne nous prit pas par surprise si bien la casse fut limitée grâce à l’expérience combattante du guide et des caravaniers néanmoins il fallut achever un blessé qui montrait des signes d’infections. Nous l’avons renvoyé vers la porte d’Origin et n’en avons plus jamais reparlé.

À Armasdem, nous découvrîmes un monde complètement différent, mon frère fut surpris par la libéralité des moeurs vigesciennes, leur grand respect pour les exploits guerriers en particulier face les Chancreux. C’était la première fois que j’entendis Farrell parler de ce qui s’était passé le jour où la Dame de la Forêt avait été éliminée ; je me doutais déjà que les choses n’étaient pas aussi héroïques que je l’avais cru enfant. Je crois que c’était une forme de libération pour Farrell, il avait gardé pendant des années le silence sur le sujet peu importe la façon dont on essayait de le faire parler. Il avait enfin trouvé la paix. Je n’appréciais pas le jus de cactus très amer mais je fis de mon mieux pour ne pas froisser mes hôtes. Je ne suis resté quelques mois laissant mon frère communier avec les vigesciens avant de décider de rentrer à Salbourg.

C’est grâce à ce retour qu’il se trouvait que j’étais de passage quand la guérisseuse, qui s’était occupée de mes blessures, fut arrêté au motif qu’elle était une servante de Vermine par un prêtre. Me souvenant de la chasse à l’homme à Nuwa et aussi de ma dette, je m’enquérais de ce qui se passait puis tentait de raisonner le prêtre. Malheureusement je compris au cours de la conversation que son esprit semblait dérangé si bien que je choisis de ne pas évoquer directement Lyudmilla. Je sus qu’il fallait avertir le seigneur du problème, le prêtre comprit - peut-être par une sorte d’extralucidité - de ce que j’allais faire et envoya des hommes m’arrêter. Je n’ai pu disparaître à leur nez et à leur barbe que de justesse grâce à l’aide de quelques villageois qui prirent sur eux de risquer les foudres du prêtre. Ils m’ont poursuivis pendant un moment avant que je ne parvienne à les semer et à avertir le seigneur. C’est une aventure que je ne répéterais pas sitôt. Je revins avec le maître du domaine, qui se trouvait être un homme bon, et sa garde investirent rapidement la prison et s’emparèrent du prêtre pour qu’il soit jugé. En faisant sortir la jeune femme, nous nous rendîmes compte du martyre qu’elle avait subi et craignîmes ne pas être arrivé à temps pour la sauver. Pour être honnête avec vous, cher lecteur ou lectrice, je reconnais que j’ai eu du mal à ne pas vomir ou tourner de l’oeil devant le spectacle. Je ne souhaiterais pas un pareil traitement même à mon pire ennemi. Je rends grâce à Vermine pour le miraculeux rétablissement de la guérisseuse qui me sauva la vie.

Quand la nouvelle de l’invention de bateaux volant à Naporia me parvint entretemps sur les routes et je fis un détour pour voir de mes propres yeux ces merveilles. Je n’ai pas eu la chance de rencontrer l’inventeur et, encore, j’ai trouvé extrêmement étrange que l’auteur d’une telle invention fût anonyme. Heureusement que je dénichais, pour une bouchée de pain, un journal très intriguant qui portait le nom de H.S. Cranelow. Le fait que son contenu soit cryptique à souhait expliquait sans doute qu’il fut vendu à un prix si bas. Ce devait être pour moi durant les années suivantes, une source de frustration et synonyme d’un grand nombre de tasse de thé vidée. Je cherchais à présent les indices qui me permettraient de pénétrer le sens mystérieux de ce ! de journal. Je ne vous en dirais pas plus.



UPDATE du 01/09/2021 : J’ai beau posséder ce journal, je n’ai pas plus avancé que ça dans le déchiffrement. Quel est donc « la Vérité d’Anima » que mentionne Cranelow ? J’ai retourné la bibliothèque du Quartier des Savoirs à la recherche de fragments de sa vie dans l’espoir d’un quelconque indice. Le texte est resté silencieux. La frustration me gagne, j’ai parfois envie d’abandonner. Mais impossible à cause de cette curiosité dévorante pour cette « Vérité d’Anima ». Qu’elle soit maudite ! Marcher dans les pas de Cranelow en exploitant ce qu’on sait de sa vie ne m’a pas mieux réussi ; j’ai enchaîné échec sur échec. Me rapproche-je seulement, ne serait qu’un peu, d’un indice ? Je prie Doseus de m’apporter ses lumières.