Visite surprise et fuite de courtoisie [15/05/2019]

Kuruk retrouvait des sensations connues à Naporia. Il était dans un renfoncement de la taverne, dans le labyrinthe. Certains le reconnaissaient. D'autres non. Il essayait de se faire discret mais s'amusait avec sa petite troupe. Il était venu voir Orokh, en savoir plus sur la situation. Depuis ses échanges avec la diplomate nuwa, il avait à coeur d'avoir tous les atouts dans sa manche. Pourtant c'était dangereux pour lui d'être ici, avec sa réputation et la rancoeur du baron Han.
Il savait qu'il ne pourrait rester indéfiniment. Mais s'il pouvait agacer les soldats de Han, il le ferait.

Aussi, il profitait du moment, avec ses hommes. Juste avant, un vigescien était venu tremblant lui demander s’il était bien « le Zéphyr ». Ce à quoi il avait répondu en rigolant, fort. Puis il l’avait invité à boire une de ces boissons trop sucrés de Naporia. Zéphyr était d’excellente humeur. Mais quiconque le connaissait, savait qu’il pouvait très vite partir dans un autre état d’esprit. Plus dangereux. En attendant, il avait juste l’air d’un chef de bande, le regard sévère, parfois un demi sourire aux lèvres, trinquant avec ses hommes et femmes bavards. Il irait même jusqu’à raconter une de ses aventures si on le lui demandait ce soir.

Zyra arpentait les "rues" du labyrinthe aux cotés d'Araxarad, a la recherche d'une place où elle pourrait se divertir après avoir achevé une mission pour Orokh exténuante.

Bien que le regroupement des vigesciens dans les ghettos de Naporia soit une marque d'inégalité évidente, ce sont les quartiers qu'elle préfère. Elle s'est adaptée aux bazars de ces quartiers et apprécie d'autant plus le fait de ne pas avoir à se cacher ou se déguiser grâce au nombre peu influent de silkien ou de nuwa : elle y est toujours à l'aise.

Son na'aji bien bâti y inspire lui aussi moins la crainte, car cette créature est loin d'être inconnue pour la population locale. Si sa mémoire était aussi efficace que celle de sa maîtresse, ce serait probablement son quartier préféré, a lui aussi.

Un bon quart d'heure plus tard, elle passa devant une taverne bruyante et animée, du moins beaucoup plus que d'habitude...
Alors elle décida de saisir l'occasion ! Qui sait qui l'on pourrait bien rencontrer ?!

Elle prit avec elle son grand sac en toile et une petite bourse de monnaie dans le grand fourre-tout que porte son na'aji. D'un claquement de doigts, la bête compris que Zyra en aurais probablement pour un moment et se coucha sur le sol, à l'affût d'un potentiel nouvel ordre, et regardant patiemment le peuple circuler autour de lui.

Zyra passa alors la clôture en bois, entrant dans la taverne. Ses talents d'espionne étaient reconnaissables à la discrétion avec laquelle elle passa cette clôture ... Ou pas ! Celle-ci était terriblement grinçante !

Les compagnons de Zéphyr se méfiaient et observaient sans en avoir l’air chaque nouvel arrivant. Aussi quand la lourde porte de bois grinça, le silence se fit un instant. Et le silence se rompit dans le même instant. Un vigescien n’était pas un danger. Et de toute façon, la bande de saoulard qu'ils avaient l'air d'être, était en fait des guerriers vigilant. Seul Zéphyr ne l'était pas. Parce que ça ne le dérangeait pas qu’on vienne l’attaquer. Au contraire, il attendait un émissaire du baron. Au moins, ça lui dégourdirait les bras. En attendant, il profitait du moment. Pas la peine d’être tout le temps sur la défensive, pas quand on avait les capacités qu’il avait.

En plus de ça, même s’ils étaient dans la nuit et qu’il faisait sombre dans la taverne, sa vision n’était pas toujours complètement nette. La chanteuse revint de sa pause. Heureusement, ce n’était pas l’ex de Kuruk qui aurait été mal à l’aise. C’était une nouvelle chanteuse, et elle venait faire quelques chants avant de laisser les clients tranquille. Le groupe de Zéphyr se tourna vers elle dans des raclements de chaise. Ils tapaient sur la table en la sifflant pour l’encourager. Ils provoquèrent aussi leur chef pour qu’il se mette au piano. Mais au piano, il serait très visible.

Tant pis se dit-il. De toute façon, ils devraient repartir bientôt. Zéphyr se leva donc lourdement avec le cliquetis de son arme, il sourit à la chanteuse et lui demanda le morceau. Puis il s’assit devant le piano et craqua ses doigts avant de commencer à jouer.

Une fois entrée, Zyra ne s'arrêta point : elle fonça au bar afin de pouvoir se désaltérer : elle en avait besoin. De toute évidence, il ne lui fallut que quelques secondes pour être certaine de la sûreté de la zone, elle décida alors de se faire plaisir avec une boisson a la fois sucrée et alcoolisée a souhait !

Assise sur son tabouret de bar, elle analysa en détails les alentours : un spectacle avec une chanteuse, un groupe de jeunes vigesciens jouant aux cartes, un autre proche d'elle enchaînant un maximum de verres... Dans ce coin-ci, deux vigesciens âgés faisait un bras de fer ! Tandis que dans l'autre coin une troupe de vigesciens tapaient la table en sifflant sans qu'elle ne sache vraiment pourquoi ... Sa volonté ? Tous les rejoindre ! Mais par qui commencer ?

Modeste à son détriment, elle persévéra pour éviter le groupe qui ne se contentait que de boire et sauta rejoindre les vieux vigesciens après avoir vidé son verre pour les provoquer au bras de fer ! Son attention portée sur le spectacle et sur les bras de fer, son visage ne pouvait qu'être épanoui !

Tout à coup, un vigescien a la peau grise et une épaulière gauche sortit du groupe de vigesciens relativement bruyant... Les cliquetis de son cimeterre étaient négligeables à coter du volume sonore de la taverne, mais pas pour Zyra.

L'espace d'un instant, elle crut reconnaître une célébrité... Mais on lui gueula que c’était son tour de jouer alors elle ne perdit pas plus de temps pour s'engager dans son duel !

Après s’être détendu les doigts au piano sur un ou deux morceaux, des mélodies populaires que son ex lui avaient apprises. Rien de bien méchant, mais il aimait la musique. Il se leva pour retourner vers les siens qui l’accueillirent en le vannant « Zéphyr le fier ! Quel honneur de vous avoir à notre table ! Zéphyr le vainqueur de l’arène ! L’impavide ! Tavernier, il nous manque des pichets pour un homme de cette trempe. »
Kuruk ne put empêcher un sourire. Mais il ne fit rien. Ce n’était pas un arrogant, et encore moins quelqu’un qui se vanterait de ses exploits. Il n’avait rien à prouver à personne. Qu’on l’aime ou qu’on le craigne, il s’en fichait tant qu’on le respectait. Il balaya juste les moqueries d’un geste de la main.
Pourtant une vigescienne saoûle à la mort se levait de sa chaise.

« Zéphyr … mais … qu’est-ce, qu’est-ce vous faites là ? C’t’un honneur, mon frère. J’vous ai vu à l’arène… j’vous l’dis… les frissons les gars. Vous l’auriez vu… Une machine c’te vigescien là. »

Elle s’écroula à moitié sur Kuruk qui la tint fermement tandis que la vigescienne tapait le torse de Kuruk.

« Ah j’suis bien contente d’vous rencontrer pour d’vrai. Z’êtes aussi redoutable qu’vous paraissez ? »

Il fit non de la tête mais ses frères et sœurs d’armes se mirent à rire. Un immense fou rire. Ils étaient intenables se dit Kuruk qui la raccompagna à sa table pour l’asseoir et la remercier avant de retourner à sa propre table. La célébrité … il ne savait qu’en faire.

Après ses victoires au bras de fer parce que les vieux vigesciens disaient avoir déjà épuisés leurs forces dans leurs précédents affronts, l'ambiance générale s'était concentré sur Kuruk Zéphyr. Aucun doute n'était présent : il s'agissait bien de lui, et Zyra l'avait reconnu. Elle supposa alors que le groupe bruyant était son équipe.

Tout à coup, une vigescienne saoule afficha Kuruk en le louangeant intensément, il fallut peu de temps pour que Kuruk raccompagne celle-ci a sa table, mais c'était bien assez suffisant pour que Zyra se faufile en transportant un tabouret jusqu’à la table de Kuruk et rigole tout aussi fort que ses partenaires.

Lorsque Kuruk revint à sa table et que la présence de Zyra attira l'attention de toute l'équipe, elle gueula fort sa petite blague :

"Bonsoir chers confrères ! Ou devrait-je dire mes frères ! Bah, oui, vous n'avez pas l'air d'être abrutis ! Pour quelle raison rigolons-nous déjà ?"