[15/09/2021] Roi, reine et pions

La Maison de la Capitale, si elle était moins grande que celle de leurs terres, compensait sa plus petite taille par autant de luxe et de modernité. Elle n'avait rien à envier aux palais environnant et l'Oncle mettait un point d'honneur à surprendre, étonner ou émerveiller les invités.

Habitué à ce faste, Arash ne le voyait même plus. Il savait quoi montrer pour avoir l'effet escompté et c'était tout. Ses appartements à lui étaient d'une sobriété curieuse quand on pensait au soin que le jeune homme prenait de son apparence. Un lit, des tentures jolies et de bonne qualité mais d'artisans encore méconnus, un jeu d'échec dans son salon, quelques sièges autour d'une table, un tapis sensé mettre ses yeux en valeur au sol.

L'arrivée de Mei Lin, bien évidemment, le perturbait un peu. Il avait espéré que cette idée de mariage serait oubliée. Qu'on le laisserai en paix à faire la guerre. Pas qu'il ait retiré quoi que ce soit de sa garnison à la frontière ou des brèves escarmouches auxquelles il avait participées mais il rêvait de gloire et ce n'était pas par une femme qu'elle allait arriver.

Il déplaça un pion. Un de ses amis lisait sur un fauteuil. Il devait voir sa promise. Quand il lui plairait de venir. Il ne voulait pas le faire sans témoin.

C'était à croire que la déesse elle-même avait souhaité ma présence en ces terres, tant la pression s'était fait sentir pour m'y envoyer. Non qu'on ne m'apprécie, dans les terres glacées de Sheng Dao, mais lorsque l'impératrice Nuwa ordonnait, la moindre noble, aussi riche et influente soit-elle, s'exécutait.

Sans but, j'avais trainé plus longtemps qu'il ne l'aurait été nécessaire dans mes appartements, observant le bal des servantes et servants, bien trop Silkien à mon goût, s'affairer à ranger mes affaires. Mes suivantes, déjà, avaient pris la liberté d'ordonner aux locaux de réorganiser ma chambre selon mes préférences - non sans oser les prendre de haut, par ailleurs. Sans doute les aurais-je corrigées, si j'avais la tête à cela.

Inspirant profondément, je rejoignais le couloir, hochant brièvement de la tête à l'adresse de l'une de mes gardes personnelles, qui m'accompagna sans mot dire. Arborant un fin et discret sourire, feint mais aux apparences sincères, je toquais à la porte des appartements de mon promis.