Une petite excursion [02/07/2021]

Je suis arrivé bien en avance devant la résidence des Mei, afin de ne pas faire attendre ambassadrice. Je m’étais posé une petite plateforme, prévue à cet effet avec le Dragon, offert par son père pour son seizième anniversaire, c'est un navire volant en forme de bateau de 70 mètres de long, de 30 mètres d'envergure et de 30 mètres de haut. Doté d'un équipage de quinze hommes et femmes très expérimentés, venant d'horizon divers, mais seulement armé de seulement deux balistes, il compte sur sa vitesse pour échapper au danger.

A sa proue, se trouve une tête de dragon stylisé qui donne lui donne ce nom, car même si même s’il a été fabriqué à Naporia, les artisans de l’Empire l’ont profondément modifié pour que l’on se rend compte immédiatement qu’il appartient à un Kaiming De Ren.

J’attends donc tranquillement fumant ma pipe, l'odeur qui s'en échappe et que j'aspire est tellement rafraîchissante que je ne peux guère m'en passer, en plus, cela m'aide à réfléchir. Je suis vêtu chaudement, avec une tenue comportant des fourrures de grand prix, car je suis un peu frileux. Je me demande qui elle va emmener comme chaperon, ce sera sans doute une femme, peut-être une amie de sa famille.

J'avais troqué ce jour-là mes habituelles robes de parade pour une autre en cuir souple d'un rouge pastel qui rappelait celui de ma nation. Comme bon nombre de mes autres vêtements, elle était fendue pour libérer mes mouvements, et j'avais comme à mon habitude décidé de porter un pantalon en dessous, ainsi qu'une fourrure blanche qui couvrait mes épaules, mais me permettait de l'enlever simplement : on n'était jamais trop chaudement habillé, en bateaux volants. Fourreau de mon épée à la ceinture et dague à son opposé, je ressemblais ainsi vêtue davantage à une guerrière itinérante qu'à une noble de l'Empire.

Accompagnée d'une escorte de deux gardes lourdement armées, j'approchais le navire d'un pas serein, cachant ma joie derrière un masque de nobilité. Il était rare que je ne sorte sans raison, le plus souvent politique ou familiale. Le prince Woo m'offrait ce jour l'occasion d'aller respirer loin de tout commérage, de toute manipulation, de tout complot qu'offraient les hauts-nés impériaux. Je n'avais même pas demandé exactement la nature de sa mission, et pour être honnête je m'en moquais un peu.

« Bonjour prince Woo Jie. J'espère que je ne vous ai pas trop fait attendre. Où allons-nous ? », fis-je en montant à bord, signalant à mon escorte de ne pas m'accompagner lors de ce voyage - fait rare, pour une noble Kaiming De Ren, et sans doute dangereux.

Voilà enfin celle que j’attendais, très belle dans sa tenue de cuir rouge qui se marie si bien avec sa fourrure blanche. Bien armé, on dirait une prétendante pour devenir l’impératrice et je suis sûr que si elle aurait très bien pu le devenir, si ma sœur n’avait pas été si exceptionnelle. Elle est juste accompagnée de deux gardes et je ne vois pas d’amie avec elle pour lui servir de gardien, ce qui m’étonne quelque peu, mais je ne suis pas au bout de mes surprises, car elle monte seule !

Son escorte reste en effet à terre et je lui souris quand elle me demande si elle n’a pas été trop longue, car il n’y a qu’une seule réponse à sa question ;

Bonjour ambassadrice Mei Lin, vous êtes pile à l’heure, c’est moi qui étais en avance.

D’habitude, cette phrase est fausse, sauf dans ce cas particulier, je satisfais ensuite à sa curiosité :

Nous partons dans le village de Pokin et au retour, je vous propose de déjeuner dans un endroit accessible uniquement par les airs, près d’une cascade.

J’ai en effet tout prévu, allant jusqu’à commander dans le restaurant dans lequel nous avons mangé, car la cuisine semblait lui plaire. Ma mère n’a pas regardé à la dépense quand je lui ai dit avec qui j’allais voyager et pour la première fois depuis, nous ne sommes pas disputés. Je continue ensuite :

Quand vous m’aviez parlé hier de danger et de confiance, je n’avais pas entièrement compris, mais je saisis maintenant la portée de mes paroles et je vous jure sur ma vie qu’il ne vous arrivera rien pendant ce court voyage.

Je fais signe au capitaine de décoller et pendant que nous quittons la terre, je dis à mon invité :

Votre tenue est parfaitement adaptée et vous va très bien.

En avance, comme tout bon homme devait l'être.

« Vous m'en voyez ravie », fis-je simplement.

Le Prince s'était bien habillé, ce jour ; on n'en attendait sans doute pas moins d'un capitaine de bateau volant, qui savait vers quelles températures il s'envolait. Je me souvenais encore de mon premier vol, et de ma pauvre toge qui, si elle m'allait à ravir, m'avait également offert le rhume de ma vie.

Il m'offrait à nouveau de déjeuner ensemble, et cette fois dans un endroit qui me semblait davantage exclusif que lors de notre précédente rencontre. Je ne pouvais m'empêcher de penser que le Prince avait peut-être un faible pour ma personne - non que cela me dérangeait, mais il me faudrait naviguer avec prudence dans ces eaux troubles, et mesurer les signaux envoyés.

« Vous me sortez le grand jeu. J'imagine que ce n'est pas pour déplaire à votre famille », lançais-je, taquine, sans savoir si j'avais raison.

« Ne vous en faites pas. Je n'aurais pas laissé mon escorte si je n'avais pas une pleine confiance en vos capacités. » Et j'étais, de surcroit, sous les effets d'un fort cocktail médicamenteux qui devrait me permettre de laisser de côté les maux de ma condition secrète de côté. A sa flatterie sur ma tenue, je ne pouvais m'empêcher de lui offrir un sourire amusé.

« Je suis ambassadrice, Jie. L'apparât fait partie de mon métier. Sans compter que les Mei me déshériteraient si je m'habillais communément face à un Woo. » La dernière déclaration était humoristique, et fausse sans l'ombre d'un doute.

La jeune femme semble être de très bonne humeur et commence par une petite phrase sur ma famille et je lui réponds en souriant :

C’est bien normal, vous n’êtes pas n’importe qui.

J’ai en face de moi, une Mei, qui doit être habituée au meilleur, je ne peux donc pas faire moins que la perfection. Le bateau monte dans les cieux aussi légèrement qu’une plume tandis que nous devisons sereinement et bientôt nous arrivons au niveau de la couche nuageuse. C’est dans ses moments-là que je me sens le mieux et j’indique à mon invité :

J’ai l’impression d’être seul au monde quand je suis ici, que mes obligations en tant qu’homme ne sont qu’un mauvais rêve et que je suis aussi libre qu’un oiseau.

Bien sûr, je sais que ce n’est qu’une illusion et qu’à moins de quitter définitivement ma famille et devenir pirate, chose que je ne compte pas faire pour le moment, je devrais me marier prochainement. Même si je n'en ai nulle envie, c'est le destin qu'à choisis ma mère pour moi, et cela me rend un peu triste.

Je vois au loin un couple d’aigles venir dans notre direction et je les désigne à la jeune femme :

Ces animaux sont magnifiques, vous ne trouvez pas ?

Pas n'importe qui ... Aux yeux de sa famille, ou aux siens ? Il me tardait d'en savoir davantage. Pour autant, je me contentais de hocher légèrement la tête à son adresse, me laissant porter par le spectacle jamais décevant de la montée du navire. Monter ainsi en altitude offrait une vue sur Sheng Dao dont on ne se lassait jamais.

« Je vous comprends. Et je compatis quant à vos obligations. Moi-même, il m'arrive de rêver avoir choisi une autre carrière. Si ma vie est dévouée à l'impératrice, votre soeur, ainsi qu'à l'Empire, je ne peux m'empêcher par moment de désirer l'égoïsme d'une dédiée à soi-même. »

Suivant des yeux l'indication du prince, je souriais doucement en observant les deux oiseaux. Il était vrai qu'on ne pouvait que difficilement égaler la majesté des aigles de notre continent. Pour autant ...

« Il y a une règle que j'ai apprise en politique, mon prince », débutais-je, tournant le dos au bastingage pour m'y adosser. « Toute majesté cache sa part d'ombre. Ces aigles, dans toute leur splendeur, dans toute leur sagesse, sont au fond des charognards. Lorsque nous nous éteindrons, ce sont ces mêmes animaux qui se repaitront de nos chairs. » Je soupirais longuement, avant de lâcher un bref et discret rire, accompagné d'un sourire à son adresse. « Mes excuses, il m'arrive de m'improviser philosophe. »

Je plaçais une main sur son épaule, légèrement complice.

« Le temps m'a appris à préférer la libre colombe à l'aigle majestueux. »

Il semble que je ne suis pas seul à rêver de liberté, et cela m’étonne un peu, car ma passagère a tout pour être heureuse, c’est une femme, avec un beau métier, d’une famille prestigieuse, mais elle est peut-être enfermée dans une cage dorée, comme moi. En tout cas, elle est d’une humeur assez pessimiste, car elle parle des magnifiques oiseaux que je lui montré comme de simples charognards et que les êtres humains seraient pareils.

Je lui souris et je lui dis d’une voix douce :

La beauté reste la beauté, parfois je ne souhaite rien d’autre que la contempler.

Elle met ensuite la main sur mon épaule et me parle de la libre colombe, ce qui me fait sourire à nouveau et je lui réponds :

Je ne suis pas aussi philosophe que vous, mais dans notre monde, les colombes se font manger. J’aimerais juste parfois ne pas être né dans ce milieu et pouvoir vivre ma vie. Dans certains endroits, les gens sont libres de vivre leurs vies comme ils l’entendent, quelles que soient leurs naissances.

Je vois les gracieux volatiles s’éloigner toujours ensemble et j’indique à ma partenaire de voyage :

Quand j’étais jeune, je me disais que même si j’étais un homme, je pouvais au moins trouver le bonheur en épousant une femme que j’aime, mais lorsque ma mère m’a refusé cela, j’ai un peu « exagéré » dans ma réponse.

C’est le mois que je puisse dire, vu que je lui ai très mal parlé et me suis enfuit après.

« Dans certains milieux », mmh ? Je ne pouvais en imaginer qu'un seul : Naporia. Je supposais que le prince rêvait de pouvoir s'y cacher. Mais, dès lors, comment financer ses expéditions ? Mais sans doute réfléchissais-je trop profondément ce qui n'était qu'un souhait innocent. Nous rêvions tous de liberté, et ni Woo Jie ni moi n'y faisions pas exception.

« Vous apprendez avec l'expérience que la liberté est concept qui n'est offert qu'avec l'influence », fis-je finalement, pensive. « Vous verrez dans tous les cas de quoi le futur est fait le moment venu. En attendant, vivons au présent. J'ai bien l'intention de profiter de ce rapide voyage à vos côtés sans le saboter avec mon pessimisme habituel. »

Etrangement, ce que j'avais vu comme une rencontre politique sous le couvert d'un motif amical devenait lentement mais sûrement agréable. L'héritier des Woo était loin d'être de mauvaise compagnie, et il me tardait de voir ce qu'il avait prévu pour moi.

« Si vous n'y voyez pas d'inconvénients, je vais faire un détour par ma cabine. Dans combien de temps sommes-nous supposés arriver à notre prochaine destination ? »

Mei Lin pourtant à peine plus âgé que moi semble avoir bien plus d’expérience de la vie que ma personne, en attendant elle semble aborder les choses d’un point de vue plus prudent que le mien. Mais je dois déteindre sur elle et quand elle annonce qu’elle va voir les choses du bon côté, je lui réponds en souriant :

C’est une très bonne résolution !

Elle me demande ensuite dans combien de temps nous arrivons à destination et après avoir consulté l’horloge solaire et le compas, je lui réponds :

D’ici une heure, si les vents continuent de nous être favorables.

Je la laisse donc rejoindre sa cabine, tandis que je reste sur le pont, profitant de la vue très dégagée que seul un bateau volant peut offrir. Tous les membres d’équipage savent exactement ce qu’ils doivent faire et nous arrivons rapidement à destination encore plus vite que prévu, c’est pourquoi je frappe à la chambre de mon invité et lui dit à travers le panneau de bois :

La Déesse semble avoir béni notre voyage, nous sommes déjà arrivés, voulez-vous m’accompagner ?

Je dois en effet descendre à terre, mais sans faire voir mon navire par les habitants du voyage. Cinq de mes hommes, armés, bien entendu m’accompagneront, car on n’est jamais trop prudent. Si elle préfère rester dans sa cabine je partirai seul, je vais en avoir pour une vingtaine de minutes, dans le cas contraire, je l’attendrais le temps qu’elle se prépare en fumant la pipe.

Une heure plus tard, alors que je m'apprêtais à rejoindre le pont, on toqua à ma porte.

« Une minute », lançais-je à l'adresse de la porte. Rangeant ma pierre à aiguiser dans ma sacoche, j'essuyais la lame trempée d'une huile à l'aide d'un tissu que je renvoyais accompagner mon kit, avant de me lever en direction de la porte.

« Quelle serait l'alternative ? », lançais-je, un sourire amusé au visage. « Laisser un homme sans défense partir sans escorte ? » Il s'agissait-là bien évidemment d'une plaisanterie, puisque j'étais à peu près certaine que certaines de ses hommes nous accompagneraient.

« Vous ne m'avez toujours pas informé de la nature de votre mission, sauf erreur. Qu'allez-vous faire à ... Pokin ? » J'avais eu une courte hésitation sur le nom de la destination. Après tout, nul Nuwa ne connaissait les noms de tous les villages environnants. Enfin, pas moi, en tout cas.

Mon invité à de l’humour, c’est le moins que je puisse dire vu les questions qu’elle me pose et je lui réponds en souriant :

Il va sans dire que je serais beaucoup plus rassuré si une noble dame telle que vous voulait accompagner un faible jeune homme comme moi. Je dois remettre un paquet à un homme et recevoir un autre à la place.

Je ne fais pas grand secret de ma mission, après tout, j’ai devant moi une alliée de ma sœur et donc de la famille. Ma mère m’a donné des instructions précises, mais ne me dit jamais pourquoi je dois les suivre ni ce que contiennent les différentes boites que je lui ramène. Je ne suis qu’une sorte de coursier à qui on peut faire confiance, grâce aux liens du sang et cela me convient parfaitement. Tant que je peux ainsi utiliser mon bateau volant et ne pas être obligé de me marier, je suis très satisfait.

Nous quittons donc le bord, bien accompagné, j’ai quand même sorti ma dague où cas où je suis séparé pour une raison ou une autre du reste du groupe et nous arrivons au petit village. Les rues sont propres et bien entretenu et les grandes maisons indiquent un niveau de vie assez élevé, sans doute grâce à l’industrie du bois. Mais je me dirige vers un quartier beaucoup moins plaisant où sont logé les ouvriers et je dois faire attention où je mets les pieds, jusqu’à arrivé devant une auberge, qui semble avoir connu des jours meilleurs, vu la façade défraichis et les quelques personnes attablés qui ont des mines patibulaires, alors je demande à celle qui m’accompagne :

Vous pouvez m’attendre dehors si vous le désirez.

Après tout, je ne veux pas obliger une Mei à entrer dans un bouge.

Les lieux n'avaient rien d'extraordinaire : un village comme on en voit beaucoup, où la pauvreté léchait les pieds des habitations des plus fortunés. J'étais, en un sens, ravie de ne pas avoir sorti mes beaux vêtements ce jour ; même si nous ne marchions pas dans la boue, je préférais tout de même salir une paire de bottes en cuir que je ne regretterais pas à des chausses en satin.

« C'est sans doute mieux », lançais-je simplement. « Je ne voudrais pas entraver votre travail, et j'imagine de toute façon que cela ne devrait pas vous prendre trop de temps. »

Autour de nous, nombre de villageois s'arrêtaient ou ralentissaient pour regarder dans notre direction : on ne croisait pas autant d'étrangers bien souvent, dans ces contrées-là. Mais si la curiosité semblait être la principale préoccupation de la majorité d'entre eux, ce n'était pas le cas d'un trio d'impériales bien trop armées pour être des villageoises et sans bannière, qui nous épiaient, sourcils froncés, depuis une ruelle voisine, un air de dégoût au visage. Je haussais les épaules pour moi-même, avant de m'en détourner.

« Prenez votre temps. En attendant, je vais profiter d'un bon bol d'air frais. »

L’ambassadrice refuse de m’accompagner et je décide de laisser également un des membres de mon équipage, un silkien nommé Raisimond, car j’ai peur que cela ne crispe un peu mon contact qui n’aime guère les étrangers. L’intérieur est, comme je l’avais supposé, d’une repoussante saleté, ou dans son jus comme dirait une personne du Temple, mais heureusement, le contact que je dois rencontrer est bien présent et je m’avance vers lui, désireux de finir mon affaire au plus vite.

En même temps à l’extérieur, récit de Raisimond :

C’est que l’on appelle revenir aux sources, c’est en effet dans une banlieue identique à celle-ci qu’il a grandi à Naporia et cela ne lui rappel guère de bon souvenir. A l’époque, une bande de petites brutes avait fait de sa vie en enfer et cela semble recommencer, car trois femmes armées l’abordent et lui demande :

Qu’est-ce que tu fais ici, l’étranger ?

Soucieux de ne pas faire de vague, celui-ci répond :

Je ne suis ici que de passage, je vous promets que je partirai dans quelques minutes et je suis désolé si je vous ai offensé de quelques manières que ce soit.

Il peut voir que la plus ancienne fait la moue, elle avait sans doute espéré pouvoir le molester un peu, mais elle se reprend et lui dit :

Tu vas devoir payer la taxe pour les étrangers, c’est dix wons d’argent, à payer immédiatement ou ce sera cent coups de bâton.

L’interpellé déglutit, il hésite à répondre au risque du créer du grabuge ou aller voir Woo Jie, contrevenant ainsi aux consignes données.

Je l'admettais, j'avais songé un instant laisser le silkien se débrouiller, me contentant au début de jouer les spectatrices. Mais il s'agissait-là de l'un des matelots et camarades du Prince, et il m'apparaissait évident que gagner des points auprès de ceux qui lui étaient proches ne ferait que m'aider à me montrer sous un jour avantageux auprès de leur capitaine.

Alors que le Silkien, dont j'ignorais le nom, commençait à trifouiller la bourse à sa ceinture, je posais prestement ma main sur la sienne, le regard rivé sur les trois impériales.

« Je vous prie de reconsidérer », fis-je calmement, le pouce gauche dégainant d'un centimètre la lame du fourreau à ma ceinture. « La déesse récompensera votre bienveillance. »

Les trois femmes s'échangèrent des regards étonnés, avant que l'une d'entre elles ne se mette à rire, bien vite jointe par les deux autres.

« Je vois ... Ou sinon ? », répondit-elle, s'humidifiant les lèvres tout en attrapant lentement son sabre qu'elle commençait à dégainer, suivie par le duo qui, elles, prirent en main respectivement épée courte et bouclier, et une arbalète pour la dernière.

« Sinon ce sera cent coups de bâton », ironisais-je avant de m'immobiliser, expirant lentement pour garder mon calme, le regard froid et analytique, scrutant les mouvements de mes adversaires en devenir. Il ne me restait plus qu'à espérer que mon compagnon d'infortune sache se battre.

L’ambassadrice refuse de m’accompagner et je décide de laisser également un des membres de mon équipage, un silkien nommé Raisimond, car j’ai peur que cela ne crispe un peu mon contact qui n’aime guère les étrangers. L’intérieur est, comme je l’avais supposé, d’une repoussante saleté, ou dans son jus comme dirait une personne du Temple, mais heureusement, le contact que je dois rencontrer est bien présent et je m’avance vers lui, désireux de finir mon affaire au plus vite.

En même temps à l’extérieur, récit de Raisimond :

C’est que l’on appelle revenir aux sources, c’est en effet dans une banlieue identique à celle-ci qu’il a grandi à Naporia et cela ne lui rappel guère de bon souvenir. A l’époque, une bande de petites brutes avait fait de sa vie en enfer et cela semble recommencer, car trois femmes armées l’abordent et lui demande :

Qu’est-ce que tu fais ici, l’étranger ?

Soucieux de ne pas faire de vague, celui-ci répond :

Je ne suis ici que de passage, je vous promets que je partirai dans quelques minutes et je suis désolé si je vous ai offensé de quelques manières que ce soit.

Il peut voir que la plus ancienne fait la moue, elle avait sans doute espéré pouvoir le molester un peu, mais elle se reprend et lui dit :

Tu vas devoir payer la taxe pour les étrangers, c’est dix wons d’argent, à payer immédiatement ou ce sera cent coups de bâton.

L’interpellé déglutit, il hésite à répondre au risque du créer du grabuge ou aller voir Woo Jie, contrevenant ainsi aux consignes données.

« Dernier avertissement », menaçais-je froidement, plaçant un pied plus à l'arrière et la main droite sur le manche de mon katana. Elles étaient trois : si l'intimidation ne marchait pas, il me faudrait en finir rapidement, et renverser la situation à mon avantage. Malheureusement pour moi, il n'en fut rien ; je percevais les légers mouvements de préparation, comme le guépard se prépare à bondir sur sa proie.

Elles étaient trois ; bien trop nombreuses pour que je ne m'en sorte lors d'un affrontement simple, et si je doutais des compétences martiales de ses deux acolytes, celle qui dirigeait le trio me semblait être forgée d'un acier plus bien solide. Enfin, je ne pouvais me reposer sur mon allié de circonstance, les Silkiens n'étaient après tout pas reconnus pour leurs faits d'armes.

Un court silence, à peine le temps d'un murmure, s'était abattu sur la ruelle, avant de se voir remplacé par le cri rageur de la guerrière au bouclier et à l'épée qui, ne me voyant pas dégainer, sauta pour m'attaquer par surprise.

« Xin, non ! », s'écria celle qui les commandait. Trop tard, alors que l'épée, en un éclair, s'était éclipsée de son fourreau pour mordre ses côtes, la laissant s'écrouler au sol en lâchant ses armes, à demi entre le monde de la Déesse et celui des ombres. Iaijutsu. L'art de sortir son sabre en un mouvement pour surprendre l'ennemi et contre-attaquer, que j'avais couplé dans un même mouvement, sans doute un peu trop tard, au lancer d'un tanto, une dague Kaiming de Ren, dissimulée dans ma botte, qui passa malheureusement trop haut dessus de la tête de l'arbalétrière. Deux contre un, cela ne présumait rien de bon.

[Lancer #1 : Corps à Corps]
[Lancer #2 : Combat à distance]

Le membre 'Mei Lin' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

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#1 'Compétences' :


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#2 'Compétences' :

Enfin, je sors de cette épouvantable auberge, mon contact a bien essayé de me retenir un peu, en m’offrant un verre, mais je ne toucherais, même pour tout l’or du monde, un verre dans ce genre d’établissement où les cafards doivent grouiller de partout.

Je cligne un peu des paupières en sortant, éblouis par le soleil et je tombe sur une scène bien étrange, mon membre d’équipage silkien est comme pétrifié, une femme est à terre, perdant son sang à cause d’une blessure à l’abdomen et Meil Lin envoie un tanto à une femme qui porte une arbalète, la loupant de peu.

Je comprends immédiatement qu’il s’agit d’une tentative d’assassinat contre la diplomate ! Je dégaine donc immédiatement ma dague et prenant la guerrière portant l'arme de jet par surprise, j’essaie de lui enfoncer mon arme dans les côtes.

Je loupe misérablement, n'étant guère habitué à manier ma lame, mais heureusement mes hommes sortent à ce moment là et nous entourent, chacun sortant sa dague.

Le membre 'Woo Jie' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

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'Compétences' :

Devant l'afflux massif des compagnons du Prince, couplé au choc de voir l'une des leurs se vider de son sang, l'arbalétrière et sa compagne, bien quelques instants plus tard pour cette dernière qui laissa quelques instants traîner son regard vers ma victime, quittèrent les lieux à la hâte. Si j'étais certaine qu'elles reviendraient chercher leur soeur plus tard, je comptais sur le fait que nous serions bien loin lorsque ce serait le cas.

L'instant suivant, je fouettais l'air de ma lame pour en retirer du sang avant de la rentrer dans son fourreau, l'entretien attendrait, avant de m'agenouiller près de la guerrière au flanc tranché, l'observant en vérifiant son pouls. La blessure me semblait grave, en particulier le fait qu'il ait causé son évanouissement, mais je n'étais pas médecin aussi sautais-je peut-être aux conclusions trop vite.

« Vous », fis-je à l'adresse de l'un des villageois spectateurs lui jetant un wen d'argent tiré de la bourse à ma ceinture. « Prévenez le soigneur local de s'occuper de cette femme. »

« Très bien ma Dame mais ... » Sans doute comptait-il me demander ce qui poussait mon souhait, étant donné que j'avais été actrice de la blessure. Pour autant, je n'allais pas satisfaire sa curiosité.

« Si vous de l'énergie pour répondre, vous en avez assez pour courir chercher le médecin », tonnais-je en fronçant les sourcils, avant que ce dernier ne s'exécute. « Quand à vous mon Prince, si je vous suis reconnaissante d'être venue à mon secours, que pensez-vous qu'il se serait passé si vous aviez été blessé ? Ou pire ? » Je me levais pour lui faire face, semblant davantage mise en colère par les actes de mon compagnon de voyage que par l'assaut lui ayant précédé.

Grâce soit rendue à la Déesse, les deux survivantes abandonnent la partie et laissent sur le champ de bataille, leur compagne, perdant son sang. Pourtant, alors que je pensais que Mei Lin allait ne pas s'occuper de la blessée, elle paye grassement un paysan pour qu’il aille chercher un médecin, l’ambassadrice est vraiment quelqu’un de gentille, ou pas, car elle m’engueule comme du poisson pourrie devant mes hommes quelques secondes après son geste désintéressé.

Bien sûr, je ne peux pas laisser pas cela, et même si je suis un homme donc destiné à être inférieur à la femme, je suis quand même un Prince et je lui réponds d’une voix très froide :

Ce n’est ni le lieu, ni le moment de parler de ce genre de chose, mais vous avez été victime d’une tentative d’assassinat et si vous auriez été vaincu, j’aurais sans aucun doute été le prochain, j’ai donc fait au mieux selon les données que j’avais.

Je la regarde droit dans les yeux, ne faiblissant pas. C’est dommage, j’allais lui dire que j’étais soulagé qu’elle ne soit pas blessée, mais devant son comportement, je ne rajoute rien, me contentant de faire signe à mes hommes de se rassembler et d’être prêt à retourner au vaisseau volant, nous n’avons plus rien à faire ici.

Le prince était vexé. Et d'un certain côté, c'était sans doute l'effet recherché. Je soupirais donc, non pas d'agacement mais d'apaisement, laissant s'échapper la colère aussi vite qu'elle était arrivée.

« Excusez-moi mon prince », débutais-je en lui posant doucement ma main sur son avant-bras, avant de poursuivre à voix plus basse d'un visage teinté par la crainte. « Ma réaction a été excessive. Vous devez comprendre que s'il vous arrivait quelque chose, je ne pourrais me le pardonner. » Et l'impératrice non plus, très certainement, mais je n'en pipais mot. « Mais vous avez raison, partons d'ici. »

Je ne faisais aucun commentaire sur la raison de cet assaut. Si je n'en étais pas vraiment la cible mais plutôt une victime collatérale, contrairement à ce que le prince pensait, je me contentais d'offrir un bref regard au silkien que j'avais peut-être sauvé du danger. Peut-être parlerait-il de ce qu'il s'était passé à son maître plus tard, mais au moins serait-ce sa décision.

La jeune femme s’excuse, ce qui est une bonne chose et elle m’explique le pourquoi de son comportement, je lui souris donc et lui réponds d’une voix calme :

Je comprends.

Je n’ajoute rien, car il vaut mieux être parti avant que la garde impériale ne rapplique et nous nous dépêchons de rejoindre le Dragon et de décoller. Une fois à l’abri du danger, je discute un peu avec mes hommes puis je rejoins l’ambassadrice pour lui parler :

Le silkien que vous avez sauvé m’a tout raconté, puis-je vous demander pourquoi vous vous êtes mis ainsi en danger ? Il allait venir me chercher et j’aurais payé cette amende fantaisiste.

J’ai en effet l’habitude d’être confronté au racisme de mes compatriotes et donner de l’argent pour arrondir les angles est la meilleure solution pour éviter les problèmes, je précise donc :

C’est une simple interrogation de ma part, croyez bien que je vous en suis très reconnaissant, mes membres d’équipages sont très importants pour moi.

Je les considère en effet comme de véritables frères d’armes, la plupart ont de la famille à l’étranger et pourtant, ils restent avec moi par loyauté et c’est quelque chose que j’apprécie à sa juste valeur. Je lui tends ensuite un chiffon en soie et lui précise :

Je sais que vous n’avez pas eu le temps de nettoyer votre épée, alors si vous voulez bien prendre ce simple tissu, cela me ferait très plaisir.

C’est la moindre des choses que je puisse faire pour celle qui a bien voulu m'aider.

A bord du Dragon, j'observais l'horizon jusqu'au moment où Woo Jie me rejoint, me demandant la motivation derrière mes actes.

« Mes raisons vous sembleront sans doute futiles, mon prince », débutais-je en m'appuyant contre le bastingage. « Un mélange entre la suspicion qu'elles ne le laisseraient pas partir, et l'honneur d'un de vos compagnons qui était en jeu. Je sais qu'il s'agit d'un silkien et que ses valeurs ne sont pas les mêmes que les nôtres, mais une guerrière nuwa ne traite pas son honneur à la légère ; et si elle en a autant qu'elle le prétend, encore moins celui de ceux qui l'accompagnent. En payant ces bandits nous validons leur existence, le crachat qu'elles représentent sur le parcours glorieux de l'Empire. »

Lui souriant, j'attrapais le chiffon en soie, sortant ma lame pour commencer à l'essuyer. Il était amusant, pensais-je alors, de constater que nous autres hauts-nés pouvions gâcher des tissus rares et coûteux par de tels agissements. Mais cela m'importait peu : le monde était rempli de forts et de faibles ; ne pas utiliser ce que nous avons à notre disposition serait insulter la condition de ceux d'en dessous.

« Je vous remercie. En toute honnêteté, je n'aurais jamais cru m'en servir d'aussi tôt, et je m'excuse si la situation n'a pas tourné comme vous l'espériez. »

La jeune femme m’explique les raisons pour lesquelles est intervenu, qui sont très complexes comment la personne qui est en face de moi. Elle accepte le chiffon que je tends et tout en nettoyant ma lame s’excuse, je la rassure donc en souriant :

Ne vous inquiétez pas, j’ai pu réaliser ma mission et c’est le principal. C’est plutôt à moi de m’excuser de vous avoir mis dans l’embarras, c’est dans des moments comme cela que je me rends compte à quel point mes compétences martiales sont faibles.

Je dégaine mon coutelas et lui indique :

C’est la seule arme dont je sais me servir et encore, pas très bien. Pour tout vous dire, je me sens un peu idiot, je suis incapable de vous aider si vous êtes de nouveau impliqué dans un combat. Je sais que, en tant qu’homme, je ne suis pas censé le faire, mais c’est quand même frustrant.

Je ne sais pas si mon interlocutrice pourra me comprendre, l’éducation impériale indique clairement les rôles de chacun, celui qui reste à la maison et celle qui protège le foyer, mais cela ne me convient guère comme rôle. Je suis sans doute trop contaminé par les idées étrangères. Enfin, cela n’est pas bien grave, je vais me marier et tout cela rentrera dans l’ordre, pour la gloire de ma Maison. Je m’appuie sur le bastingage, près de la diplomate, regardant la terre défilée sous mes yeux et je l’informe :

Nous arriverons à notre lieu de pique-nique dans un couple d’heures.