Une petite excursion [02/07/2021]

La jeune femme m’explique les raisons pour lesquelles est intervenu, qui sont très complexes comment la personne qui est en face de moi. Elle accepte le chiffon que je tends et tout en nettoyant ma lame s’excuse, je la rassure donc en souriant :

Ne vous inquiétez pas, j’ai pu réaliser ma mission et c’est le principal. C’est plutôt à moi de m’excuser de vous avoir mis dans l’embarras, c’est dans des moments comme cela que je me rends compte à quel point mes compétences martiales sont faibles.

Je dégaine mon coutelas et lui indique :

C’est la seule arme dont je sais me servir et encore, pas très bien. Pour tout vous dire, je me sens un peu idiot, je suis incapable de vous aider si vous êtes de nouveau impliqué dans un combat. Je sais que, en tant qu’homme, je ne suis pas censé le faire, mais c’est quand même frustrant.

Je ne sais pas si mon interlocutrice pourra me comprendre, l’éducation impériale indique clairement les rôles de chacun, celui qui reste à la maison et celle qui protège le foyer, mais cela ne me convient guère comme rôle. Je suis sans doute trop contaminé par les idées étrangères. Enfin, cela n’est pas bien grave, je vais me marier et tout cela rentrera dans l’ordre, pour la gloire de ma Maison. Je m’appuie sur le bastingage, près de la diplomate, regardant la terre défilée sous mes yeux et je l’informe :

Nous arriverons à notre lieu de pique-nique dans un couple d’heures.

Je me contente de secouer la tête avec un sourire, non pour me moquer de son manque d'expérience mais pour lui signaler qu'il n'y a aucun mal. Me retournant sur moi-même pour m'appuyer à mon tour sur le bastingage, observant l'horizon avec curiosité.

« Je ne vous cache pas que j'ai hâte de découvrir ce que vous m'avez réservé. » Je laissais s'échapper un bref et discret rire, les yeux plein de malice. « J'ai presque l'impression d'être en tort, de me balader avec vous. Je n'ose deviner ce qui se dirait dans les cercles impériaux si cela se savait. »

« Quant à vos prouesses martiales ... Personne ne nait savant, Jie », commençais-je en osant user de son prénom seul. « Si vous me promettez que cela reste entre nous, et qu'aucun Woo n'en aura vent, je pourrais peut-être vous montrer quelques techniques, à l'occasion. Après tout, nous avons quelques semaines avant mon départ de l'Empire. »

Ma jeune interlocutrice me fait par de sa curiosité envers notre déjeuner et de son inquiétude si cela venait à se faire savoir, j’essaye de la rassurer en lui indiquant ;

Les membres d’équipages me sont fidèles, je sais qu’ils ne diront rien.

D’ailleurs, quand elle me propose quelques leçons d'escrime, je lui dis avec un grand sourire :

Ce sera un immense honneur pour moi, Mei Lin.

Je n’ose pas l’appeler par son prénom comme elle vient de la faire, même si nous nous rapprochons doucement, elle reste une femme et donc, supérieur à moi à tous les niveaux. Nous arrivons ainsi à notre objectif, un plateau à pic, à mi-chemin d’une montagne, avec comme fantaisie une superbe cascade qui rejette l’eau une centaine de mètres plus bas, sûrement dû à un éboulement récent.
Le lieu est féerique, car nous sommes comme coupés du monde. Le lieu n’est pas très large, une centaine de rayons tout au plus, mais c’est largement suffisant. L’herbe a entièrement pris possession des lieux et cerise sur le cadeau, à cette attitude, nous ne craignons pas les moustiques !

Le débarquement se passe bien, mes hommes partent manger d’un côté et prenant le panier repas, nous nous installons sur une petite avancé rocheuse où nous avons une vue imprenable sur toute la région. Je sors donc les victuailles qui sentent vraiment très bon et je demande à mon invité, avec un grand sourire :

Alors, que pensez-vous de mon repaire secret ?

Difficile de ne pas être émerveillé par la vue qu'on m'avait offert. Bien qu'inquiète par la faune, je ne doutais pas qu'à cette altitude l'on n'aurait sans doute que peu de prédateurs. De plus, il semblait que le prince n'en était pas à sa première visite ; aussi avait-il dû sonder les lieux au préalable.

« C'est ... », balbutiais-je, les yeux écarquillés. « C'est vraiment magnifique. »

Je m'écartais quelques instants du groupe sans vérifier si Woo Jie m'accompagnait pour m'approcher du précipice et observer la cascade, avant de le rejoindre et d'observer ce qu'il sortait de son panier, avant de hausser un sourcil, un discret sourire amusé au coin des lèvres.

« Est-ce que je me fais des idées, ou je peux reconnaître la provenance de ces victuailles ? »

Je suis content de voir la réaction de ma passagère, elle a littéralement du mal à parler et pourtant, il en faut beaucoup pour impressionner une diplomate, surtout venant de la famille Mei ! Quand elle m'interroge sur la provenance du repas que je luis sers, je lui réponds en souriant :

Vous avez raison, il s’agit bien du restaurant que nous avions fréquenté après notre visite au Temple, j’ai le souvenir que vous aviez aimé la nourriture, alors j’en ai commandé. Il y a du canard laqué, du bœuf aux oignons et du Lu Dou Gao en dessert.

Le nombre de plats est moins important, ces derniers sont plus simples également, car ils devaient être facilement transportables. Ils sont même encore chauds, car ayant été transporté dans des plats en bois bien fermé. Je les dispose donc sur la nappe, lui proposant des baguettes, avant de m’asseoir en tailleur, avec quelques difficultés d’ailleurs, car je ne suis pas très souple. Il s’agit d’un repas à la bonne franquette et avec un grand sourire, je lui dis :

Bon appétit.

Le panorama s’étend littéralement à nos pieds, il est vraiment magnifique et pourrait même ressembler à une peinture, si ce n’était la chute d’eau qui s'élance vers le vide et les oiseaux qui nous survolent.

M'asseyant à son côté, je lui offrais un sourire empreint, pour une fois, d'une certaine timidité. Déjeunant avec un plaisir non feint les différents mets qui m'étaient proposés, je ne remerciais que peu mon appétit d'oiseau.

Une naissante et légère brise s'était emparée de mes cheveux d'ébène, et je les laissais libres d'errer à son bon vouloir, tournant le regard vers le merveilleux lointain pour qu'il ne puisse voir les traits de mon visage. Je le savais : je n'étais de ces canons de beauté dont le sourire seul faisait chavirer les coeurs, ni de ces charmeuses de serpent qui pouvaient de quelques mots les manipuler ; ma beauté était dans le mystère, dans la difficulté de me lire. Et en cet instant, j'étais belle.

« Jie », fis-je enfin, brisant le silence. « A quoi pensiez-vous, en m'invitant ici aujourd'hui ? »

La jeune femme grignote dans les plats que j’ai apportés, semblant apprécier les mets proposé. Je la vois, les cheveux flottants au vent comme les miens, admirant sans doute la vue, puis elle me pose une question qui me surprend quelque peu, je prends même quelques secondes de réflexion. Je ne veux pas qu’elle pense des choses sur mon compte, ce n’est pas parce que je suis le frère de l’Impératrice que j’abuse de mon pouvoir, c’est même tout le contraire et je lui réponds donc d’une voix douce :

Je voulais mieux vous connaître et vous offrir un moment de détente. Les rares où nous nous sommes croisés au Palais, vous sembliez très soucieuse et comme je tiens à vous, j’ai voulu vous offrir un moment de détente.

Je m’arrête un peu pour manger quelques cuillerées d’un gâteau de riz, avant de continuer :

Je ne dispose pas de grand-chose, à part ce navire volant et vous devez avoir compris ce que je dois faire pour le garder.

Après tout, j’ai devant moi une femme, donc une personne intelligente et en plus habitué à la diplomatie, rien ne doit lui échapper. Je conclus donc d’un ton enjoué :

Bref, il faut parfois profiter du moment présent, tout simplement.

C’est en tout cas, ce que je fais, en finissant ce succulent dessert.